Scandale du Mediator : les laboratoires Servier et l’ANSM condamnés
Publié : 29 mars 2021 à 9h15 par Iris Mazzacurati
Plus de dix ans après le retentissant scandale du Mediator, les laboratoires Servier ont été condamnés lundi 29 mars à 2,7 millions d'euros d'amende pour "tromperie aggravée" et "homicides et blessures involontaires" dans le scandale sanitaire de leur médicament Mediator, produit à Gidy dans le Loiret, tenu pour responsable de plusieurs centaines de décès.
Les laboratoires ont "fragilisé la confiance dans le système de santé", a déclaré la présidente du tribunal Sylvie Daunis. Les laboratoires ont en revanche été relaxés des faits d'"escroquerie".
"Malgré la connaissance qu'ils avaient des risques encourus depuis de très nombreuses années, (...) ils n'ont jamais pris les mesures qui s'imposaient et ainsi trompé" les consommateurs du Mediator, a déclaré la présidente du tribunal correctionnel.
Jean-Philippe Seta, l'ex-numéro 2 du groupe pharmaceutique et ancien bras droit du tout-puissant Jacques Servier, décédé en 2014, a lui été condamné à quatre ans d'emprisonnement avec sursis. Le parquet avait requis à son encontre cinq ans dont trois ferme et 200.000 euros d'amende.
303 000 € d’amende pour l’ANSM
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), jugée pour avoir tardé à suspendre la commercialisation du Mediator, a quant à elle été condamnée à 303 000 euros d'amende.
Le tribunal correctionnel a estimé que l'Agence avait "failli dans (son) rôle de police sanitaire et de gendarme du médicament" et lui a infligé la peine maximale de 225 000 euros pour "homicides et blessures involontaires" par négligence, à laquelle s'ajoutent des peines d'amendes contraventionnelles à hauteur de 78 000 euros. Le parquet avait requis une amende de 200.000 euros.
Un procès « hors normes »
Dans la salle d'audience principale, quelques dizaines de parties civiles - sur les plus de 6 500 constituées à l'occasion de ce procès "hors norme", espérant un jugement "exemplaire".
A leurs côtés : la pneumologue de Brest Irène Frachon, qui a révélé au grand public cette affaire, l'un des pires scandales sanitaires français.
Lors du procès-fleuve ouvert en septembre 2019 et clos en juillet 2020, une question a été centrale : comment le Mediator a-t-il pu être prescrit pendant trente-trois ans malgré les alertes répétées sur sa dangerosité ?
Pour l'accusation, les laboratoires Servier ont sciemment dissimulé les propriétés anorexigènes (coupe-faim) et les dangereux effets secondaires de ce médicament, utilisé par 5 millions de personnes jusqu'à son retrait du marché en 2009.
Les laboratoires Servier se sont toujours inlassablement défendus d'une "volonté délibérée de tromper". "Ils n'ont pas identifié un signal de risque significatif avant 2009", a argué l'un des avocats du groupe.
(Avec AFP)