Violences conjugales : un dispositif de suivi renforcé mis en place à Saintes
16 octobre 2019 à 4h30 par Lucie Claussin
La lutte contre les violences conjugales se poursuit en France. En Nouvelle-Aquitaine, le procureur de Saintes a décidé d'expérimenter un dispositif innovant afin d'endiguer ce phénomène.
Alors que nous venons d’apprendre le 121ème féminicide commis en France cette année, des mesures sont mises en place peu à peu dans le pays afin de protéger les victimes et surtout éviter une récidive de la part des auteurs. En Charente-Maritime, Nicolas Septe, le procureur de Saintes a lancé il y a tout juste un mois un dispositif de suivi renforcé à destination des auteurs de violences conjugales :
Légalement, ce suivi renforcé s’inscrit dans le cadre de la justice dite "thérapeutique" ou "restaurative". Il a été inspiré de pratiques canadiennes mises en place dans les années 70 et qui ont déjà fait leurs preuves. Selon les chiffres du Canada où le dispositif est appliqué, les risques de récidive sont de 10%, contre 55% lorsque l'auteur de violences conjugales est placé en détention.
Un poste créé pour mener à bien le projet
En Charente-Maritime, pour l’heure, le dispositif est appliqué sur la base du volontariat de la part des auteurs de violences conjugales qui sont éligibles à ce système. Une personne spécialisée issue du milieu médico-social prendra en charge ses dossiers afin de venir en aide à l’auteur de violences, mais aussi à la victime. Nicolas Septe nous a expliqué son rôle en détail :
A Saintes, le nombre de dossiers pour violences conjugales a augmenté de 30% par rapport à 2018 selon le procureur. Et un fort pourcentage de passage à l’acte se fait sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiants. L’objectif de cet agent en charge des dossiers, est que l’auteur soit réellement pris en charge dans ses problématiques de soins et d’emploi. Ainsi, le traitement des addictions permettra de limiter les récidives.
L’agent de suivi devra aussi veiller au respect des interdictions d’entrer en contact avec la victime et de paraître à son domicile. C’est le procureur, en concertation avec le juge, qui fixera précisément les obligations à respecter dans le cadre d'un contrôle judiciaire. La victime pourra quant à elle contacter l’agent de suivi si jamais il y a un souci quelconque. Le dispositif a donc une double entrée : il s’adresse aux auteurs de violences conjugales mais aussi aux victimes qui pourront trouver un véritable soutien et appui.
Quand pourra être appliqué ce suivi ?
Concrètement, ce dispositif sera mis en place avant le jugement du prévenu, dans le cadre d’une enquête classique suite à un dépôt de plainte ou un signalement. Il pourra être appliqué au prévenu dans une durée allant de deux à six mois. Ensuite, lors de l’audience de jugement, le tribunal correctionnel disposera d'un rapport sur le suivi renforcé qui a été appliqué et pourra en tenir compte lors du prononcé de la peine. Actuellement, trois auteurs de violences conjugales ont été inscrits dans ce dispositif de suivi renforcé. Les retours concernant cette expérimentation sont pour l’heure très positifs.
Vers une modélisation du dispositif ?
Ce dispositif, qui est une première en France, pourrait bientôt être étendu. En effet, dans le cadre du grenelle contre les violences faites aux femmes, la haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes du ministère de la justice, a contacté le procureur de la république de Saintes afin d’envisager la modélisation de ce système sur d’autres territoires. Il est aussi envisageable que ce dispositif soit prochainement proposé aux différents parquets du territoire national. À savoir que le grenelle se poursuit jusqu’au 25 novembre.