Est-il possible de gouverner par décret comme le souhaite Jean-Luc Mélenchon ?

9 juillet 2024 à 22h03 par Lucas Pierre

Après le second tour, Jean-Luc Mélenchon a annoncé vouloir gouverner par décrets.

Crédit : C0

Jean-Luc Mélenchon annonçait sa volonté de gouverner par décret à l’issue des résultats du second tour des élections législatives. Mais est-ce vraiment possible ?

Si un Premier ministre issu de la coalition de gauche prend le pouvoir, pourra-t-il diriger grâce aux décrets ? Pour ça, encore faut-il déjà trouver une personne à placer. Car la liste du ou des prétendants se fait toujours attendre. Manuel Bompard réaffirmait ce mardi matin que Jean-Luc Mélenchon reste envisageable pour le poste. Mais Fabien Roussel, leader du Parti communiste français n’est pas d’accord. Lui, préfère une personnalité plus consensuelle que l’ancien patron insoumis. Clémentine Autain, qui s’est détachée du parti, affirme de son côté être prête à endosser le rôle, tout comme Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste.


Bref, pour le moment, c’est le flou. Ce qui est déjà un peu plus certain, c’est que le futur Premier ministre, s’il est issu du Nouveau Front populaire, dirigera par décret, comme l’a annoncé Jean-Luc Mélenchon à l’issue du résultat du second tour des élections législatives, dimanche soir. L’objectif serait notamment d’abroger la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron. Mais est-ce réellement possible ? Dans les faits, ce n’est pas si simple.


Plusieurs barrières, dont la Constitution


Tout d’abord, oui, un Premier ministre peut, bien entendu, publier des décrets. Mais ceux-ci sont encadrés par la Constitution, et plus précisément l’article 34. Le chef du gouvernement peut ainsi agir sur les droits civiques, la nationalité, ou encore le code pénal. Voilà déjà une première barrière.


Vient ensuite un principe un peu moins concret, mais qui reste important : depuis plusieurs mandats, le Premier ministre a pris pour habitude de faire signer un décret par le Président de la République, notamment lors d’un Conseil des ministres. Ce n’est en aucun cas obligatoire, mais c’est devenu une tradition. Le « soucis », c’est que la plupart du temps, il arrive que ce décret comporte un paragraphe mentionnant le besoin d’une autre signature du chef de l’État pour un second décret qui viendrait invalider ou modifier le premier. Manoeuvre qui paraît délicate dans le cas où le président reste le même lors des deux textes.


Autre problème : il n’est tout simplement pas constitutionnel d’interdire une loi par décret. Celle-ci peut être neutralisée pendant un temps, mais pas plus ! Ainsi, dans le cadre de la loi sur la réforme des retraites, impossible de revenir sur son cadre législatif. Mais la limite d’âge peut être modifiable. Bref, gouverner par décret semble, du point de vue du droit, un véritable chien de croix, et il n’est pas certain qu’un Premier ministre issu du Nouveau Front populaire puisse finalement faire ce qu’il souhaite.